Un système de gouvernance de l’eau globalement bien conçu mais non mis en œuvre
Le Maroc a promulgué une Loi sur l'eau en 1995 actualisée en 2015 qui constitue un cadre juridique adéquat pour une gestion intégrée et durable des ressources en eau. Ainsi, la planification et la gestion des ressources en eau sont effectuées à l'échelle des bassins hydrauliques (Plans Directeurs d’Aménagement Intégré des Ressources en Eau PDAIRE par bassin hydraulique, Agences de Bassins Hydrauliques ABH), et des organes de coordination et de concertation à différents niveaux tels que le Conseil Supérieur de l'Eau et du Climat, la Commission Interministérielle de l'Eau (CSEC) et les Conseils de Bassins Hydrauliques (CBH) ont été institués. Les contrats de gestion participative de l'eau et le principe de "préleveur-payeur et pollueur-payeur" sont également prévus par la loi. Enfin, le secteur de l'eau bénéficie de ressources financières relativement importantes.
Malgré ce cadre réglementaire satisfaisant, le système de gouvernance de l'eau au Maroc souffre de faiblesses importantes. Nombreux textes d'application de la loi ne sont pas encore publiés ou appliqués. Les organes de coordination et de concertation sont non fonctionnels, entraînant une faible cohérence des stratégies sectorielles.
Les contrats de gestion participative des nappes n'ont pas donné les résultats espérés en raison de problèmes d'échelle et de faible implication des usagers finaux. Il y a également des chevauchements d'attributions entre certaines institutions et des mandats multiples au sein de certaines institutions cumulant des missions régaliennes et opérationnelles. Les moyens humains, notamment pour le contrôle des prélèvements d’eau, restent très insuffisants. On relève également une faible contribution des usagers au financement du secteur, une absence d'évaluation régulière des résultats par une autorité indépendante et une faible implication des universités et institutions de recherche.
Nos recommandations :
Libérer le potentiel du cadre légal et réglementaire en accélérant la promulgation des textes d’application manquants de la Loi 36-15 et en veillant à l’application de manière stricte de toutes les dispositions de ces textes, ce qui nécessite un renforcement significatif des capacités des Agences de Bassins et l’instauration de mécanismes permettant l’instruction rapide des délits
Clarifier les responsabilités des institutions impliquées dans le secteur de l’eau et harmoniser leurs stratégies : séparer les missions de définition des politiques des missions opérationnelles de construction et de gestion des infrastructures, redynamiser les instances de concertation et de coordination (CSEC, CIE, CBH, etc.), imposer une évaluation d’impact sur les ressources en eau pour tous les grands projets d’investissement publics et privés.
Responsabiliser les acteurs par la promotion de la participation effective des usagers de l’eau à travers des associations représentatives et par la mise en place d’un système efficace de suivi-évaluation basé sur les résultats des politiques et programmes du secteur de l’eau par une entité indépendante
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